Le tribunal administratif de Paris se déclare compétent pour juger de la légalité des ventes d’armes de la France dans la guerre au Yémen mais valide celles-ci

Mardi 9 juillet 2019 le tribunal administratif de Paris s’est déclaré compétent pour juger de la saisie du 7 mai 2018 d’Action Sécurité Ethique Républicaines (ASER) qui demandait la suspension des ventes d’armes de la France en direction des pays de la coalition dirigée par l’Arabie Saoudite et les Emirats arabes unies, responsables de crimes de guerre au Yémen. Le recours d’ASER, rejointe par l’Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture (ACAT), est basé sur le traité sur le commerce des armes des Nations Unies et plus particulièrement sur son article 6:

«Aucun État Partie ne doit autoriser le transfert d’armes classiques… s’il a connaissance, au moment où l’autorisation est demandée, que ces armes ou ces biens pourraient servir à commettre un génocide, des crimes contre l’humanité, des violations graves des Conventions de Genève de 1949, des attaques dirigées contre des civils ou des biens de caractère civil et protégés comme tels, ou d’autres crimes de guerre tels que définis par des accords internationaux auxquels il est partie »

Article 6 paragraphe 3 Traité sur le commerce des armes

C’est une décision historique des juges français qui ouvre ainsi une nouvelle jurisprudence sur les « actes de gouvernements » en France sur les questions d’exportation d’armes. Malheureusement les juges n’ont pas poursuivi ce mouvement : « pour que justice soit faite au peuple yéménite » et ont rejeté la demande de suspension des ventes d’armes de la France en direction des pays de la coalition. 

Alors que l’Allemagne, le Danemark, la Finlande, les Pays Bas et la Suède, la Suisse en Europe, mais aussi les Sénateurs étasuniens[1],  ont eux refusé d’être co-responsables des crimes de guerre au Yémen par leurs transferts d’armes. La justice française se dérobe à ses responsabilités de faire appliquer la légalité internationale pourtant conforme à l’article 55 de la constitution française et l’article 46 du traité de Vienne qui précisent que les lois des traités ont une valeur supra nationale. Le tribunal administratif ne motive pas la raison du refus d’application direct de l’article 6 du TCA qui est pourtant suffisamment précis pour ne pas laisser de doute quant à son interprétation.

Pourtant les décisions du Conseil d’Etat Wallon et celle de la Haute Cour de Justice de Grande Bretagne ont donné raison aux ONG – qui avaient demandé la suspension des licences d’exportations vers l’Arabie saoudite – auraient pu inspirer les juges français. Il n’en a rien été. Cette non décision ne préjuge en rien de la validité de la Saisie d’ASER rejointe par l’Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture (ACAT).

ASER fera appel de cette décision devant la Cour administrative de d’appel de Paris.

Nous saisirons également la Cour de Justice de Union Européenne pour savoir si oui ou non la décision du Tribunal administratif est conforme au droit européen.


[1]Dans un vote le jeudi 20 juin, ils ont refusés de valider pour 8 milliards d’exportations d’armes en direction des pays de la coalition dirigée par l’Arabie Saoudite et les Emirats arabes unies: https://www.nytimes.com/2019/03/13/us/politics/yemen-saudi-war-senate.html

Pour d’autres articles sur ces questions, consulter le blog: Armer Désarmer

ASER est membre du Réseau d’Action International sur les Armes Légères (RAIAL).

ASER est accréditée aux Nations Unies.

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